Yann Battard (EDHEC Master 1993) d'une carrière dans les médias à l'innovation en parfumerie

Yann Battard (EDHEC Master 1993) a réalisé une carrière dans les médias et le digital au moment où celui-ci émergeait. Son appétence pour les nouvelles technologies et les innovations lui a ouvert les portes des plus grands groupes. Visionnaire, il s’est ensuite lancé dans l’entrepreneuriat et est aujourd’hui CEO de Made By Me.

Yann, qui est aussi mentor pour l’Incubateur EDHEC Entrepreneurs, nous raconte son parcours et les défis de Made By Me  face aux nouvelles attentes des consommateurs sur le marché du luxe et de la parfumerie.

Raconte-nous ton parcours après l’EDHEC

Après l’EDHEC, j’ai surtout développé une expérience dans l’univers du digital, des médias et des nouvelles technologies. Ainsi, je me suis très vite intéressé à la publicité sur Internet lorsqu’elle commençait à émerger. Mes connaissances sur ces sujets m’ont ouvert les portes de TF1 pour monter toute l’activité marketing digital, j’ai passé une dizaine d’années sur l'activité digitale à travailler sur des marques, audiences et contenus variés : TF1, LCI, la Star Academy, les Coupes du Monde sur Eurosport… J'ai ensuite pris la direction générale des activités Internet pour le groupe NRJ où les challenges étaient de diffuser de la web radio et de la radio dans des appli mobiles ainsi que positionner la marque sur les premiers réseaux sociaux et créer des communautés fortes sur Facebook.

C’est avec ce bagage média, digital et nouvelles technologies que tu t’es ensuite lancé dans l’entrepreneuriat ?

Oui, j’ai rejoint un associé pour cofonder notre première startup qui s’appelait Mediabong. À l’origine, c’est une place de marché de vidéos sur Internet. On a rapidement fait pivoter l’activité sur des aspects plus publicitaires : améliorer la performance publicitaire des vidéos sur Internet, faire en sorte qu’on diffuse la bonne vidéo à la bonne personne. Ces années ont été très intenses avec un développement aux USA, plusieurs levées de fonds, les montagnes russes aussi en termes de réussite. Ce fût une expérience des nouvelles technologies : intelligence artificielle, big data, tout ce qui permet de créer de la valeur, mieux connaître le consommateur et optimiser les performances de ces vidéos.

Au bout de sept ans, j’ai choisis de rejoindre Made By Me qui est un projet porté par ma compagne, qui a fait sa carrière dans des grands groupes de cosmétiques. Elle avait une idée, une innovation en cosmétique et elle cherchait des compétences à la fois entrepreneuriales et digitales pour l’aider à la développer.

Raconte-nous la naissance de cette innovation 

Made By Me, une marque de parfumerie innovante qui révolutionne la manière de se parfumer. Avec des parfums en crèmes compactes, Made By Me offre la possibilité de créer soi-même son parfum en combinant différentes senteurs. Le tout, présenté comme du maquillage, en différentes palettes au design moderne et coloré. 

Comme beaucoup d’innovations, au départ, on est vraiment parti en R&D pure, il y a eu plus de deux ans de travail des équipes pour arriver à un résultat. On ne savait pas du tout si on arriverait à faire ça. On a désormais une formulation de parfum sous forme de crème compacte qui arrive à tenir aussi longtemps et à être aussi concentré qu’un autre parfum classique, ça n’existe pas aujourd’hui sur le marché. Il existe des parfums solides depuis la nuit des temps, depuis les Égyptiens qui faisaient ça avec de la cire ou du beurre. Mais ce sont des matières qui sont assez graisseuses, assez collantes, et qui ne diffusent pas bien. Notre innovation n’a pas ces inconvénients. 

Quelles sont les expertises et expériences qui te servent aujourd’hui à développer cette nouvelle marque ?

Innover c’est aussi savoir gérer des métiers qui demandent beaucoup d’expertise et qui se créent en permanence. On ne trouve pas sur le marché des profils qui savent faire des métiers qu’on invente. Ça veut dire arriver à trouver, à constituer des équipes, à motiver des équipes avec des profils qui sont rares, qui sont très demandés, et qu’il faut arriver à faire grandir au sein de sa structure.

Pour la partie développement, je me sers évidemment de mon expérience entrepreneuriale : structurer des sociétés, créer notre filiale en Corée, également l’expertise sur la partie financement avec des levées de fonds, construction de business plans, etc.

Et puis l’autre expertise, c'est évidemment l’expertise digitale, donc la création de sites, la communication digitale, l’analyse de la data digitale, l’acquisition clients et tous ces beaux sujets, qui sont par ailleurs pour certains d’entre eux des sujets que j’enseigne à l’EDHEC.

Made by Me, c'était un besoin ressenti du marché ou alors est-ce l’envie de bouleverser le secteur ?

Les deux ! D’abord, c’est quand même un marché dans lequel il y a des attentes consommateurs qui ont changées. Si on regarde les millenials ou la génération Z, ce sont des générations qui ont davantage envie de s’exprimer à travers un parfum plutôt qu’endosser une marque qui existe avec son image et ses valeurs. C’est également une génération qui recherche des marques écoresponsables. Nous avons de vraies convictions écologiques et nous avons réalisé un gros travail pour proposer un parfum entièrement recyclable, zéro plastique. Nous avons également banni un certain nombre de composants des formules de parfums qui sont aujourd’hui des composants autorisés, mais discutés et suspects. On a aussi toujours cette excitation d’« écrire le nouveau luxe », écoresponsable et gourmand. Nous ne sommes pas dans l’esprit d’un boitier noir laqué de chez Chanel. On propose des produits plus colorés, plus vitaminés, plus ancrés dans les nouvelles consciences écologiques.

Quels sont les défis et enjeux de Made By Me ?

On est très attaché à l’ambition de permettre aux gens d’exprimer leur personnalité, de devenir parfumeurs tout en leur simplifiant énormément l’expérience. C’est toute la difficulté et tout le talent de l’équipe de fragrance designers qui a travaillé sur ces parfums : faire en sorte que, quelle que soit la combinaison que vous faites de ces différents parfums, vous ne pouvez pas faire de faux pas. C’est un peu comme une palette maquillage des grands make-up artists (les maquilleurs professionnels), elle est conçue pour que tout puisse aller ensemble. Ce sont des parfums que vous pouvez utiliser seuls ou les combiner, et ça marchera toujours. Il y a cette idée de démocratisation qui est importante tout en restant un produit de luxe, évidemment, parce qu’il n’y a pas de concession faite sur la qualité et la concentration des parfums.

Est-ce qu’on ne reviendrait pas à l’essence même du luxe : avoir quelque chose d’unique ?

Bien sûr. Je crois que le luxe ce n’est pas un rattachement à un univers qui est imposé par une marque, mais au contraire, une notion d’empowerment. On peut exprimer son unicité à travers une belle expérience olfactive, et c’est ce que nous proposons. C’est une tendance qu’on retrouve pas mal en Asie, c’est la raison pour laquelle on oriente beaucoup nos efforts et notre développement vers cette région du monde (on démarre avec la Corée). Il y a des attentes des consommatrices de produits de luxe en Asie qui sont aujourd’hui un peu lassées des grandes marques classiques, iconiques françaises. Elles ont envie aussi de trouver quelque chose d’autre qui leur permette d’affirmer davantage leur personnalité.  

Quels sont tes objectifs et tes ambitions avec cette marque ?

Alors d’abord la faire exister ! On a fait le choix d’être diffusé en ligne, à travers notre site e-commerce. On veut avoir un contact avec notre communauté, créer une communauté d’acheteuses, mais aussi de makers, de gens qui vont s’approprier le parfum, créer leur propre recette. Évidemment, sur le site, on trouve des recettes pour démarrer la personnalisation de son parfum, mais ce qu’on a envie de voir, notre ambition, c’est que quand on vous demande « tiens, tu sens très bon, qu’est-ce que c’est ? », que vous puissiez répondre « C’est mon parfum Made By Me, c’est made by Caroline ». On veut que cette communauté se partage ses recettes et grandisse en expertise.

On a envie de faire partie des leaders de ce nouveau luxe, qui est un luxe écoresponsable, et si on pouvait avoir un jour une belle histoire un peu comme Glossier par exemple qui a démarré sur le web autour de cette communauté et de cette expertise cosmétique, ça serait vraiment un beau succès (ndlr : Glossier est une marque de cosmétique au succès fulgurant, porté par une communauté digitale très engagée).

Plus d'informations :

- Instagram : https://www.instagram.com/madebymeperfumes/

- les témoignages en vidéo : https://madebymeperfumes.com/fr/zoom-sur/ce-quon-dit-de-nous/