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La relation au travail des Français, un enjeu pour la présidentielle

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10.13.2011

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La relation au travail des salariés de notre pays s'est profondément dégradée ces dernières années et mériterait à ce titre d'être, aux côtés de l'emploi et des salaires, l'un des éléments du futur grand débat démocratique. Praticiens des ressources humaines, nous craignons pourtant qu'à l'instar des deux dernières élections présidentielles elle ne soit à nouveau totalement éclipsée, faisant des lois Auro ux, il y a trente ans, le dernier grand rendez-vous sur ce thème.

Or toutes les études convergent pour indiquer que les Français ont mal à leur relation au travail. Les études internationales mettent en évidence la situation singulière de la France qui se caractérise par un niveau très élevé de défiance dans l'entreprise. Le débat public pour sa part est resté figé entre une promesse de réhabilitation trahie, « le travailler plus pour gagner plus » d'un côté, et une vision centrée sur la souffrance au travail de l'autre. Mensonges du travailleur autonome d'un côté et totalement victime de l'autre.

Face à la pauvreté du débat public, que nous disent les salariés de ce pays de leur relation au travail ? Dans leur majorité, ils restent convaincus que le travail peut être un facteur d'épanouissement et refusent le retour des visions doloristes, faisant du travail un élément d'alié nation et de contrainte par nature. Ils sont profondément choqués des comportements financiers court termistes qu'ils opposent à la vision entrepreneuriale. Ils refusent intuitivement cette vision manichéenne opposant performance sociale et performance économique, qu'ils sentent intimement liée, pour peu que l'on veuille bien mesurer cette dernière dans la durée.

Dans ce cadre, le débat politique nous semblerait gagner à aborder quelques enjeux clefs. Comment renforcer la communauté d'intérêt entre les parties prenantes de l'entreprise ? Refuser la caricature opposant par nature les intérêts des salariés à ceux de leurs dirigeants et des actionnaires, « les salaires contre les dividendes », conduit nécessairement à s'interroger sur la pertinence d'un certain nombre de mécanismes qui ont altéré cette relation. Les rachats d'actions tout d'abord. Des montants considérables de cash-flow ont été engloutis par nos grandes entrepr ises, pour l'essentiel en vain, pour soutenir le cours de leurs actions, au détriment de l'investissement, de l'innovation, donc de la solidité durable. La rémunération des dirigeants ensuite, dont l'enjeu nous semble tout autant le montant absolu que son évolution, décorellée trop souvent de la performance réelle, c'est-à-dire celle qui s'apprécie dans la durée.La fiscalité enfin qui, des plus-values à l'investissement, ne différencie pas les comportements distributifs immédiats de ceux qui contribuent à renforcer l'entreprise.

Les contraintes économiques continueront de peser lourdement sur les perspectives en matière de salaire ou d'emploi de la majorité des salariés. Il faut ouvrir de nouvelles perspectives d'amélioration des conditions de travail, corrigeant les excès de la décennie précédente. S'agissant des mécanismes de rémunération, il importe d'encourager en proximité la prise en compte de la performance de l'équipe , du collectif de travail, pour contrebalancer les effets de l'évaluation de la seule performance individuelle. S'agissant de l'organisation du travail, il faut développer des espaces et du temps pour permettre à la « relation sociale », y compris managériale, de retrouver une place et un rôle dans la vie au travail. Enfin, il y a urgence à systématiser les chartes d'usage des nouvelles technologies, notamment pour le temps non professionnel, en rendant explicite la réponse à des usages privés et souvent piégeants.

La gestion des carrières doit aussi s'adapter à une réalité nouvelle, faite de ruptures, de changements et d'une vie professionnelle allongée. Il faut anticiper et accompagner les ruptures de carrière : chacun doit pouvoir bénéficier à périodicité régulière - au moins tous les 5 ans -d'un bilan de compétences et se voir proposer des évolutions de carrière pour pouvoir étendre et développer son champ de compétences, ses capacités d'adaptation. Il faut faciliter le temps sabbatique de milieu de carrière et son financement, précieux temps de prise de recul et d'enrichissement. Rupture souvent utile dans des parcours professionnels longs. Enfin, il faut lever le tabou de la préparation de la fin de carrière en acceptant des fins de parcours avec un salaire moindre, mobilisant les compétences spécifiques de la maturité, comme la médiation, probablement moins productives mais indispensables pour entretenir l'harmonie.

Dans un environnement difficile, la relation au travail doit retrouver sa place car elle est un élément essentiel de la compétitivité du pays mais aussi de la qualité de vie de chacun d'entre nous.


La relation au travail des Français, un enjeu pour la présidentielle D'ÉRIC ALBERT ET BRUNO METTLING . Eric Albert est président de l'Ifas, Bruno Mettling est DRH de France Télécom.

Source : Les Echos

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